vendredi 6 octobre 2017

Je me hais


Je me hais quand le jour se lève, les conneries commencent... la vie longue – la mort brève – qui l'eût cru pour un handicapé de la langue – borborygme – pouic ! prix fruits et légumes – EDF/GDF – hypermarché – sécurité sociale – S.S. – S.A. – Bébé – grand–mère – voilà empêtré dans les matricules, les factures, les chiffres –
Pâte dentifrice – savon – shampooing longueur de pointe – horaire – usine – bureau – chemin long qui va du soleil à la lune – les variations de température – du berceau au linceul – des maths au boulot – du pantalon éléphant au froc tuyau de poêle – la ligue maritime et coloniale française – qui n'y est pas "mauvais français" – le maccarthysme – le soviétique – le racisme "touche pas à mon pote" – le bon soldat – le harki – le collabo – le résistant – le péché – le saint–père–le–pape – Staline – Mozart – Armstrong – Les Beatles – le rock – les émois – le sida ... ça va, toutes directions, les hippies, les punks – on ne sait plus où on en est ! Retenez vos moutons de l'azur, la langue des Muses, les lignes minuscules de la police d'assurance, l'eau chaude au quart de tour, le linge propre qui se salit tout le temps, qui s'enrhume dans le vent, le vent doux des douceurs, le vent dur qui gueule, les yeux deux qui pleurent, les amours qui tombent à la poubelle, la marguerite des seins frais, les menstrues, les orgasmes, les intestins qui se bouchent et se débouchent, les dents cariées, le teint rose qui va vers le gris, les grands écrivains qui écrivent pour ne rien dire, qui occupent le temps pour parler de la pluie et du beau temps qui n'en ont rien à faire puisqu'ils circulent en roue libre sans s'occuper des saisons, des heures, du calendrier, des mille métiers qui se bousculent pour gagner la vie perdue en activités creuses, les grands jules et les culs qui se succèdent à longueur d'écran – les parents qui ne comprennent pas les enfants, les enfants qui ne comprennent pas les parents, la vie qui gonfle et ne sait plus où placer ses détritus. Tout dégoûte, tout amuse – les rues mortes, les places pleines – le chômage et la surproduction – le crève–la–faim et le super–nanti, les raviolis, les fonds de gamelles pour les bas–fonds sans fond – les stars qui puisent le pognon dans la poche des béats babaches – le cirque permanent de la vie qui nous leurre – le rêve du rêve qui s'achève sous la racine des pissenlits – le passé, l'avenir, le style, la mode qui passe avec les passants des ans – les objets – les objeux – un homme, une femmes, ses enfants, son auto, sa moto, sa télé – ce n'est pas assez – un chien, un chat, des poissons – l'art du lard pour nourrir la culture qui ne comprend rien de ce qui arrive à ceux qui vivent entre poire et fromage oubliant les chansonnettes des derniers poètes – l'écran, le journal, le bruit, le silence de la nuit qui s'éveille, le lendemain, le jour se lève les conneries commencent – la vie est belle quand elle n'est pas triste – l'escalier roulant porte les pingouins de magasin en métro, de métro en bistrot – on boit, on mange et ça recommence pour occuper les boyaux, les doigts du temps qui file ses perles pour les yeux qui ne voient que du feu – prennent les vessies pour des lanternes – les discours pour évangile, l'évangile pour paroles qu'ils ne croient pas – ça change ça bouge et ça change ça bouge plus ça recommence c'est du pareil au même sous papier cadeau –
On se trouve avec son sac d'os dans l'emballage de peau qui ne sait où poser les gants – Ainsi on n'en finit pas d'en finir à se gratter la cervelle et l'on pense que plus on cherche à comprendre – Shakespeare et le poète bouseux – Molière et le déconneur du coin – l'écrivain public et le baratineur de mes deux – ma tante à bafouille et mon oncle branleur – le novateur pompier – le pompier de l'avenir main dans la main à la galerie Jobardat – le rigolo qui pète plus haut que son cul – le cul encombré des merdes orphiques – les putes Eurydistiques à la recherche d'un barbu à senteurs poétiques – le sac à provisions de blouseries nouvelles pour arroser les plantes du Crédit Universel – le pauvre mec qui se crève le cul pour engraisser le compte en banque – la banque qui achète la dernière connerie en sponsor – l'ayant droit qui a droit de fermer sa gueule – carrousel du samedi où nana va se faire enculer en pensant à la fin du mois que c'est excellent contre la constipation dit le médecin qui en a marre des gens qui geignent pour des points le lundi matin fatigué au point qu'il [le médecin] aux clients, leur mettrait bien le poing sur la tronche et se débarrasser vitos des jérémiades après avoir empoché le pognon – au revoir, messieurs, mesdames, merci beaucoup – c'est toujours ça de pris – et qu'on en a rien à foutre du plaignant souffreteux que son chèque – passez la monnaie, ça roule tous azimuts – en liquide – en solide, en blanc – noir – l'argent blanc vaut l'argent noir – jaune – café au lait – ou teint caca – rien à foutre du racisme – Vive la Banque de France ouvrez les cuisses du tiroir–caisse – enfoncez ça profond – pièces et billets – tout est bon pour la rue des finances qui baratine le gagne–petit – le bilieux – bigleux – l'envers et l'endroit – celui qui l'a dans le cul comprend tout de suite sa douleur – faut pas s'appeler Polytechnique pour comprendre !
Sacrilège ! Effacez–moi ça ! – Mais non – mais non – pas question – on a besoin d'air neuf – d'écriture blanche – OMO donnez–nous des lettres lavées à basse température ! Ah oui ! mais si c'est pas saignant c'est ramollo – on voudrait de la bave entre les lèvres – du tableau au goût du jour – du sperme rock – de le vulve look qui ne repassera plus – triste nouveauté ancienne à remplacer tous les ans – Remplacer quoi ? la connerie qui se lève chaque jour – limonade – menthe à l'eau et vaseline

Gaston Criel, Popoème, Les éditions du chemin de fer

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