mercredi 22 février 2017

Voilà, quoi...


Benoît voulait savoir si j'avais vu ce film dont tout le monde parle, avoir mon avis. Moi, je m'attendais à ce que ça danse un peu plus. Une comédie musicale, quand même, ça danse, en général. C'est plein de références, il paraît. La scène d'ouverture, notamment. J'ai dit oui, mais sans le souvenir particulier d'une séquence pareille par le passé. Il ne savait pas non plus, C'est vrai que j'en ai pas vu beaucoup de comédies musicales, c'est pas trop ma tasse de thé, en général, a-il avoué. Mais oui, c'est bien. Ça change. C'est bien filmé. L'acteur, on a vraiment l'impression que c'est lui qui chante, ils ont trouvé une voix très proche de la sienne, ils sont forts ces Américains. Je lui ai appris que c'était bien le comédien qui chantait, qu'il ne s'agissait pas de playback comme dans Les Parapluies de Cherbourg qui, par le thème, pas la forme, était la source principale d'inspiration du film de Chazelle. Ah oui, j'ai entendu ça, mais je n'ai jamais vu ce film. Je n'aime pas trop les films de Demy, a-t-il ajouté. C'est bien Demy, Les Parapluies ? Catherine Deneuve, non plus, j'aime pas trop. Mais La La Land, c'est bien, j'étais content de le voir. Benoît se sent obligé de voir ce dont tout le monde parle. Ça lui offre l'impression de vivre dans son temps, de comprendre ce monde qu'il sait complexe. Fort heureusement, il ne lit jamais. Autrement, nous aurions des conversations autour de Mussot, Angot ou Onfray. Issu d'une lignée aristocratique, sans doute la branche dégénérée, catholique pratiquant, chef scout, inconditionnel de Sarkozy hier et de Fillon aujourd'hui, Benoît aime parler. Tout au moins aime-t-il brasser les thèmes de l'actualité, faits divers, programmes télé, cinéma, chanson, tout y passe... Et puis, il y a des scènes qui expliquent comment ça aurait pu se passer. C'est un film qui fait réfléchir aussi, quoi. Qui mérite le battage autour... Voilà, quoi. Voilà, quoi est une de ses expressions favorites. Il l'utilise pour signifier qu'il n'a plus rien à dire sur le sujet. J'avais fini mon café, mais il a tenu à me demander si je n'étais pas trop triste après la mort de Leonard Cohen. J'ai essayé de m'en tirer par une pirouette afin de regagner au plus vite mon bureau. J'ai parlé de son âge, d'une vie bien remplie, des conneries de ce genre. Je t'avoue, a-t-il cru nécessaire d'ajouter, je ne comprends pas trop ce qu'il chantait, c'est poétique, je crois, hein ?, et en anglais. Faut être bilingue pour apprécier, non ? Lui, Dylan, ou Nick Cave, je n'ai jamais vraiment accroché, je ne comprends pas. J'ai parlé des goûts et des couleurs mais pensais aux coups et à la douleur qu'il comprendrait aisément si j'étais un tant soit peu sincère. En quittant la cafétéria, il m'a administré une tape sur l'épaule, C'est bien qu'on échange un peu, entre collègues, on se parle pas trop, hein, habituellement, enfin, je trouve, hein, voilà, quoi... 




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